Mémoire d’elles
Mémoires d’Elles est une série de portraits noir et blanc. Chaque image regroupe trois femmes d’une même famille, grand-mère, mère et fille. Les photographies sont accompagnées d’un bref récit biographique sous forme d’interview d’une, ou des personnes représentées, qui permet de retracer l’histoire de la lignée. Chacune des familles vit à Paris ou dans sa proche banlieue.
Le projet est conçu comme un ensemble qui, sous forme d’exposition puis de livre, constituera un album de société sur un siècle vécu.
Ainsi, Mémoires d’Elles établit une sorte de carte d’identité objective de la société française urbaine à travers ses femmes, et montre comment, à travers elles, se catalyse notre évolution. La grand-mère – même lorsqu’elle est issue d’un déracinement – incarne une tradition parfaitement identifiable ; la mère s’affirme comme la résultante d’une mutation profonde et la fille symbolise à la fois l’éclatement des schémas mais aussi l’élément de continuité et de transmission.
Paradoxalement l’absence des hommes sur les photographies est évidente. C’est peut-être le premier constat qui s’impose : avec l’éclatement des valeurs matrimoniales et des valeurs sociales attachées au nom, les femmes sont devenues (ou redevenues ) les gardiennes de la lignée, et incarnent l’élément de continuité dans l’ordre social.
En évitant tout didactisme, la photographie apparaît bien comme le moyen idéal de constituer cette sorte de carte d’état civil face à laquelle le lecteur sera amené à la fois à se positionner et à s’interroger.
Les images sont là, disponibles, denses – car la présence de trois à quatre femmes sur l’image donne naturellement une intensité et une complexité réelle à toute lecture – et l’esprit du lecteur oscillera entre des impressions immédiates et sensibles face à l’image, et une réflexion qu’il pourra construire en confrontant ces impressions aux informations plus objectives du texte.
Dans sa conception, le projet tente de respecter une sincère objectivité. Néanmoins, on réalisera certainement qu’en dernière analyse, la vision personnelle de chacun recomposera un panorama ‘impressionniste’, où l’implication des sujets photographiés et celle du lecteur feront surgir un sentiment profondément subjectif qui renverra peut-être à l’ultime vérité du projet : celle des individus face à leurs parcours et dans la perspective de notre histoire immédiate.